Portrait clair-obscur des millenials

Portrait de millenials
Portrait de millenials

 

S’il fallait encore une preuve pour démontrer la révolution du digital dans nos sociétés, les millenials, appelés également « Génération Y » ou encore Génération Why » en serait un preuve des plus probante.  Sous ce nom se cache les 15-35 ans  qui ont connu un monde où le digital est devenu omniprésent. Cacher n’est d’ailleurs pas le bon terme, car jamais une génération n’a été autant scrutée au travers de nombreuses études. Pourtant, est-ce que c’est une réalité sociologique ou ou une invention marketing ?

Le terme Millennial a été utilisé pour la première fois en 1989 par les historiens américains Neil Howe et William Strauss pour désigner une nouvelle génération faisant suite aux « Silent Generation », « Baby Boomers » et « Génération X » et dont les membres les plus âgés sont nés en 1980. En France, les « native digital » représentent 10 millions d’individus ayant la particularité de vouloir vivre pour eux, leur famille et dans le temps présent tout en ayant la perception des évolutions d’une société qui se transforme rapidement. 

Des caractéristiques communes

La définition d’une génération telle que développée par Mannheim en 1928 est de considérer que  c’est le regroupement d’individus « à la situation analogue dans l’espace social », appartenant à la même classe d’âge et ayant fait l’expérience des mêmes événements historiques, sans nécessairement les avoir perçus ou vécus de la même façon. De fait, de cette perception différente, il faut décomposer  en ensembles générationnels marqués par la formation de liens entre leurs membres par des contenus réels, sociaux et intellectuels.

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La génération Millenial doit être vue ainsi comme un ensemble dont l’analyse est encore complexifiée par la transformation digitale brutale de nos modes de communication, d’information et interactions avec les autres. 

Alors que le terme adulescent avait été forgé pour la génération Y (1980-2000), le « Millenial type » ne rentrerait dans l’âge adulte, tout en conservant l’état d’esprit de l’adolescence, mais il vivrait en même temps les différents âges de la vie (enfance, adolescence, adulte). Pierre-Henri Tavoillot propose la notion de « maturescence » pour souligner que la maturité n’est plus un point d’arrivée –ce moment de la vie où un homme devient un être « accompli »– mais un processus.

Les millenials et la communication
 
Plutôt que Génération Millenials, on devrait parler de génération web. Dans son ouvrage The Medium is massage paru en 1967, Marshall McLuhan parle de village planétaire (« global village ») pour qualifier les effets de la mondialisation, des médias et des technologies de l’information et de la communication, bien l’avènement du web et des réseaux sociaux.
 Comme l’indique l’étude signée LivePerson, aux États-Unis et au Royaume-Uni, près des trois quarts des jeunes sondés se disent plus enclins à communiquer de façon digitale (via un email, un SMS ou les réseaux sociaux) plutôt qu’à discuter dans le monde réel. En France, dans le détail, 61% disent opter pour le digital plutôt que converser en face à face.
L’étude signée Facebook et Roland Berger montre que près de 6 millennials attendent une réponse en moins d’une heure lorsqu’ils ont une demande à faire à une marque. Une autre étude récente, réalisée par Kantar Media et Kantar Millwardbrown, révèle aussi que 75 % des millennials estiment que les marques ont tellement peu de sens qu’elles finiront par disparaître.

Derrière les clichés
 
Plus de soixante-dix noms ont été accolés à cette jeune génération : Digital natives, Millennials, Net Gen, Génération Y,  Generation Why, Corporate Hackers, génération Me Me Me, et même « Petite poucette », terme façonné par Michel Serres pour illustrer leur utilisation intensive de leurs pouces sur les smartphones. Preuve en est d’un concept flou, où se mêle utilisation d’outils, modes de pensée, années de naissance, et analyse sociologique et définition marketing … 
 
Tel un tableau en clair-obscur, il se dégage du concept millenial, un  mélange et une opposition entre les ombres et lumières. L’étude La Chose et Deloitte en montre les aspérités. Décrits comme connectés, urbains, mobiles et rejetant les codes traditionnels. Connectés oui, mais 75 % lisent des livres imprimés. Du fait d’avoir baigner dans la culture numérique, ils ont acquis un recul salutaire. Seuls 27 % se considèrent comme très connectés, tandis que 37 % jugent même les réseaux sociaux négativement. N’oublions pas le phénomène de harcèlement qu’ils ont pu connaître sur les réseaux sociaux. Les chiffres d’une enquête belge montre l’impact négatif du digital pour la génération des moins de 20 ans (Génération Z). 40 % des élèves ont subi une agression en ligne.12.5 % des adolescents disent avoir déjà été « cyberharcelés » via les réseaux sociaux. Entre 3 et 4 adolescents victime de « cyberharcèlement » se suicident en France chaque année.
 
Loin des valeurs traditionnelles ? Non, 92 % voient la famille comme une valeur importante, et même comme la plus importante de toutes pour 62 %. Leurs valeurs : l’éthique et la technologie. Leur paradoxe : boulimiques du digital, un smartphone greffé à la main, ils rêvent aussi de déconnexion totale en pleine nature.  
 
Pour le sociologue Serge Guérin, il y a bien une « génération Y » qui « pour la première fois, la jeunesse influence directement ses parents non pas de façon superficielle (à travers la mode ou la musique) mais de façon fondamentale d’un monde de plus en plus digital.  Pour d’autres ce concept est trop flou pour être valable.  
Le casse-tête des Millenials n’est pas près d’être résolu et de nouvelles terminologies arrivent telles que la Génération Z (les personnes nées entre 1995 et 2010), et même la Génération Alpha (enfants nés après 2010). Ces derniers ne sont pas nés avec Internet, avec les réseaux sociaux, mais dans le digital. Une étude américaine révèle que plus des ¾ des enfants de 2 ans ont déjà testé des jeux vidéo ou des applications sur un smartphone…